7 Chapitre 7.1 – L’art en chemin

Barbara Meilleur

Par Barbara Meilleur

Chapitre 7.1 (Version PDF)

Présentation de l’auteure

Je suis née et j’ai grandi sur un territoire éloigné des grands centres, à 900 kilomètres à l’est de Montréal. Des centaines de kilomètres d’accès au fleuve Saint-Laurent d’un côté et aux épinettes de l’autre. J’honore aujourd’hui le fait d’avoir pu côtoyer ce territoire nord-côtier. Peu d’éléments de culture, selon les paradigmes la décrivant comme « opéra, musée, théâtre », ont fait partie du paysage de mon enfance. Puis, durant mes études collégiales, j’ai travaillé au Musée régional de la Côte-Nord. Je pense que c’est là que j’ai eu accès pour la première fois à un art différent; une salle du musée (qui n’était pas la plus fréquentée) proposait le travail d’une artiste qui, à travers son œuvre, présentait le jeu de l’ombre et de la lumière dans un bassin d’eau, dans une approche très contemporaine et surtout très contemplative. Dans le contexte du musée, il s’agissait pour moi d’une œuvre très contrastée avec l’environnement régional. Je sais aujourd’hui qu’il ne s’agissait pas d’un contraste avec le territoire ou la culture de ma région – car contemplation + éléments de la nature (l’eau, la lumière, ses reflets sur une surface) = tout à fait l’environnement régional! – mais plutôt d’un contraste dans la façon de dire les choses. Ce langage de l’art actuel, cette façon sensible de présenter les éléments m’a alors accrochée.

Un rapport différent à la nature et à la culture m’était présenté et j’ai l’impression qu’encore aujourd’hui, je porte ce contraste, ce rapport sensible-rationnel, à la fois poétique et intellectuel, à la fois traditionnel et contemporain, simple et complexe, naturel et culturel… Chose certaine, j’ai d’imprimé en moi le mystère de cette première œuvre contemporaine contemplée (eau, son, lumière), présentée dans cette grande salle épurée d’un musée du Québec lointain. Avec du recul, je constate que cela représente un évènement marquant dans mon parcours et explique qu’une partie de mon enseignement vise à permettre à d’autres de vivre cette immersion dans l’art actuel.

Introduction

Remettre en question notre façon d’aborder la culture en arts, quelle idée intéressante! Parce que les arts, c’est la culture, non? Si on vous interroge sur ce qu’est la culture, vous penserez à ce que représentent, pour vous, les personnes cultivées. Vous aurez peut-être en tête cette tante super élégante qui, en plus de voyager en Europe pour assister à des concerts, fréquente le théâtre et le musée et peut citer des auteurs obscurs dans les soupers de famille. Considérant ce paradigme sur la culture, dans un contexte scolaire, plusieurs s’en remettront aux enseignantes et enseignants des quatre arts qui sont prescrits par le programme (art dramatique, arts plastiques, danse et musique) pour soutenir des activités culturelles qui développeront la culture des individus en tant que spectateurs. Dès lors, une sortie au théâtre plus tard et quelques affiches d’œuvres maitresses collées aux murs de la classe, c’est réglé, nos élèves seront plus cultivés et cultivées. Non?

Alors que les défis de la société actuelle nous invitent à revoir notre rapport au monde et à la culture, cette ressource de formation nous propose l’exercice suivant : bonifier notre conception de la culture, dans notre posture de personne enseignante, en y incluant notre rapport écologique au monde. On dit souvent que les artistes sont « en avance sur leur temps ». C’est pourquoi je vous invite à vous laisser inspirer par des artistes en art actuel1 dont le travail s’inscrit, justement, dans une telle démarche d’inclusion d’un rapport écologique au monde dans la pratique artistique. Vous voyez poindre déjà le beau collage fait à partir d’éléments récupérés du bac de recyclage2? Je vous propose d’aller plus loin pour enrichir votre pratique.

Maude Pelletier – Abstraction racinaire, monotype, 12,7×12,7 cm, 2022

Vous trouverez dans ce chapitre des pistes de réflexion vous invitant à poser un autre regard sur votre façon de guider les enfants vers l’art, en ayant comme modèles des artistes contemporains dont la démarche est inspirante. Premièrement, nous débutons par un survol des pratiques de quelques artistes incontournables à travers une balade dans le monde de l’art. Puis, nous continuons avec quelques éléments théoriques qui permettront de nous pencher sur des pistes plus concrètes pour les classes du primaire, tout en proposant des pistes pour l’enseignement-apprentissage des arts inspirées de démarches d’artistes. Enfin, vous trouverez quelques références pour continuer cette réflexion d’inclusion du rapport écologique au monde dans l’approche culturelle en enseignement.

 

PARTIE 1 : Les balades dans l’art actuel
Avant de former les élèves, il faut penser à se former!

On peut observer un certain écart entre l’art pratiqué aujourd’hui, soit celui qui porte un regard sur le monde (à travers des pratiques hybrides, des installations interactives, une démarche qui inclut la communauté, etc.), et les propositions de création et d’appréciation qui sont offertes aux enfants des écoles primaires. Mais si l’art qui se pratique à l’extérieur des murs de la classe pouvait nous inspirer? Et si celui-ci pouvait nous aider à mieux saisir ce que représente le rapport écologique au monde dans l’enseignement des arts au primaire? Je vous propose tout d’abord un parcours pour aller à la rencontre de l’art à travers une balade au musée, une balade en ville et une balade dans la nature.

Balade au musée

Votre parcours débute ici. De nature curieuse, vous vous dirigez, en solo, vers le musée. Imaginons que ce musée vous propose des œuvres contemporaines. Vous avez un peu peur, puisque la dernière fois que vous avez mis les pieds dans un musée, c’était… c’était… c’était quand, déjà? Que risquez-vous? Vous risquez de constater, avec surprise, que vous y avez votre place. Vous faites l’exercice de vous arrêter devant une œuvre en particulier. Vous ne lisez pas tout de suite le titre. Vous passez plusieurs minutes à l’observer. Grand format, petit format? Est-ce une sculpture? Une peinture? Regardez les couleurs, la texture, les lignes, les formes. Que se passe-t-il dans l’œuvre? Que vous raconte-t-elle? Peut-être vous parle-t-elle d’un souvenir, d’une histoire qui n’est pas la vôtre. Peut-être aussi qu’elle ne raconte rien, mais que votre œil ne peut s’empêcher d’en scruter maintenant tous les détails qui s’y trouvent et qui vous avaient d’abord échappé. Donnez-lui de l’attention. Trouvez-lui un titre. Pensez au sentiment qui vous habite maintenant. Finalement, vous décidez de vous informer un peu sur le contexte de production de l’œuvre. Après avoir fait cet exercice, vous sortez du musée. Voilà un pas de plus de franchi vers la culture! Avec un peu de chance, vous aurez remarqué que l’artiste dont vous avez exploré quelques œuvres traduit dans son travail des préoccupations de son époque. Ressemblent-elles aux vôtres? Votre venez de vivre, peut-être, une initiation à l’appréciation en art (compétence 3 du PFEQ).

Balade en ville

Vous ressortez du musée et continuez votre parcours. Votre œil commence à s’aiguiser. Tête penchée vers votre téléphone, vous remarquez que des œuvres ont été peintes au sol, sur le béton des trottoirs et l’asphalte des rues. Vous apprenez que Roadsworth, l’artiste qui est passé par là, peint des œuvres qui s’adressent aux piétons et piétonnes qui arpentent lentement la ville plutôt qu’aux automobilistes à la course. S’agirait-il de son projet Walkscape (Walkscape — Roadsworth), visant à faire sortir les gens de leurs voitures? Avec son art, l’artiste Roadsworth « crée, renouvelle et améliore des espaces qui promeuvent et célèbrent la marche et d’autres modes de transport actifs tout en mettant l’accent sur la notion de jeu3 ». Quelques-uns de ses objectifs : « embellir et revitaliser les “espaces morts”, c’est-à-dire les espaces négligés ou sous-utilisés, […] mettre en œuvre l’apaisement du trafic, soutenir les stratégies de création de lieux, produire des visuels qui mettent en valeur l’identité culturelle d’une communauté [et] mettre en œuvre des stratégies qui encouragent et favorisent les modes de transport actifs4 ».

Le regard ravi par toutes ces couleurs au sol, vous continuez votre marche. En levant la tête, vous remarquez que des banderoles, affichant des mots amoureux et poétiques, ornent les balcons de plusieurs appartements. Tiens, une autre artiste est passée par là… Au bout d’une courte recherche, vous apprenez que c’est Patsy Van Roost (patsyvanroost.com). Vous tombez sous le charme. Sur son site officiel, vous lisez ceci :

NOUS. Depuis bientôt dix ans, j’orchestre des actions artistiques participatives hors les murs pour nous célébrer, nous honorer, nous raconter et nous dévoiler.

MES MAINS, MON CŒUR. Avec ma machine à coudre, des pochoirs, des mots cousus, des histoires qui s’allument aux fenêtres, des portes qui s’ouvrent et des banderoles qui font parler les balcons, je sème de la bienveillance et tisse des liens entre voisin.es et passant.es loin des galeries et des musées.

CRÉER DU SENS. J’aime concevoir des expériences significatives avec et pour mes voisin.es, les écoles, les arrondissements, les maisons de la culture, les organismes communautaires, les festivals, et les villes.

J’AIME LES GENS, LES LIEUX ET LEURS HISTOIRES.
(Ma démarche, patsyvanroost.com)

Soudain, vous vous souvenez d’avoir déjà entendu parler de son projet qui avait permis d’exposer, dans des bouteilles, l’amour congelé des résidents et résidentes de La Petite-Patrie pour le conserver et le partager. Vous reviennent aussi en mémoire les balades artistiques et poétiques qu’elle propose.

Vous méritez une pause. Bien au chaud dans un café, vous avez le réflexe de consulter votre téléphone. Sur un réseau social, un microrécit (une story) présente votre ami qui s’est rendu dans un centre d’artistes pour vivre une expérience de réalité virtuelle dans une œuvre de Caroline Gagné. Il raconte qu’il a pu ressentir le calme et la tempête dans une forêt, assis sur une roche et immergé dans une expérience sonore (Autofading_Se disparaître, carolinegagne.ca). Vous apprenez aussi que votre autre amie vit une drôle d’expérience dans le hall de cette bibliothèque où est présentée une œuvre constituée de méduses géantes. Lorsqu’on s’approche trop près d’elles, chacune transmet ses vibrations, petit à petit, à toutes ses congénères tout en s’illuminant. Il s’agit de l’œuvre RÈGNE ARTIFICIEL IV de Rosalie D. Gagné présentée au Grand Théâtre de Québec5 . Y aurait-il là un message, une intention? Les algorithmes étant ce qu’ils sont, vous vous retrouvez à regarder une publicité de la prochaine grande installation de l’artiste canado-brésilien Rafael Lozano-Hemmer, dont le dispositif technologique présente des faisceaux lumineux qui réagissent en temps réel au rayonnement cosmique invisible qui arrive de l’espace, en provenance des étoiles et des trous noirs (Collider, 2023). Wow! Vous ne pouvez en rester là; vous effectuez des recherches et l’ampleur de ses réalisations vous transporte.

Puis, vous voyez une affiche de ce grand musée… Une œuvre photographique y est représentée sur laquelle on voit une femme dont le corps supporte un enchevêtrement d’éléments de la nature. Mais quelle image intrigante : la femme sur la photo a les yeux fermés et semble profiter du soleil et du vent sur son visage. Située dans un paysage hivernal, elle a le visage peint en rouge constellé de taches blanches et porte sur sa tête ce qui ressemble à un gigantesque nid d’oiseau. Vous imaginez déjà tous les jeux créatifs possibles à proposer aux élèves à partir de l’image. Vous poussez vos recherches et vous apprenez qu’il s’agit de Meryl McMaster, une artiste dont le travail « se concentre sur le territoire, l’environnement naturel et la migration, avec l’espoir que nous tous conservions un équilibre écologique avec le monde qui nous entoure6 ».

Balade dans la nature

Vous décidez, le lendemain, de fuir le béton pour vous promener au parc. Vous vous assoyez sur un banc pour apprécier un peu le son ambiant et les odeurs qui embaument l’air. Pendant que vous repensez à votre balade au musée de la veille, vous remarquez un petit bambin, accroupi au sol. Il s’intéresse à quelque chose qui vous échappe, mais il est facile d’imaginer que devant ses pieds se trouve un monde microscopique, minéral, animal, végétal, à la fois stable et en mouvement. Cela vous rappelle vos souvenirs d’enfance et les heures passées à jouer dehors, avec un bout de branche et quelques mottes de terre. Mais où s’en est allée toute cette magie? Vous rappelez-vous, durant votre enfance, avoir passé du temps à contempler quelque chose qui aujourd’hui vous paraitrait banal? Essayez de vous rappeler cet état dans lequel on peut être enfant, quand on s’approche du sol pour contempler des minéraux assemblés dans un caillou, le parcours d’un insecte vers son nid, le simple mouvement d’un brin d’herbe qui se balance au vent. Quel lien peut-on faire entre cet état et celui que vous vivrez peut-être en faisant l’expérience d’une rencontre avec l’art dans un musée, une galerie, un site web, une place publique, un environnement naturel7 ? En quittant le banc de parc, vous voyez un petit chaos de minuscules branches se déplacer au sol, en roulant, comme les virevoltants des déserts des films westerns. Cela vous rappelle l’ingéniosité biomécanique et poétique de Theo Jansen et sa manière de propulser ses sculptures avec le vent8 .

Imaginons maintenant que demain, c’est le retour en classe. Vous vous dites peut-être que toutes ces expériences de la fin de semaine doivent être partagées avec vos élèves. Vous remarquez peut-être aussi que ce que vous allez leur raconter, à la manière d’une histoire, ce sont des démarches d’artistes. Est-ce bien la réalisation physique de l’œuvre qui a suscité votre émerveillement ou est-ce plutôt la volonté de tisser des liens, inscrits dans cette démarche, qui a marqué votre imaginaire? Sentez-vous un peu plus, maintenant, l’envie d’intégrer dans votre enseignement l’apprentissage des savoirs disciplinaires dans une démarche artistique plus ancrée dans un rapport écologique au monde?

Vous réalisez qu’il vous faudra bientôt préparer votre prochaine situation d’apprentissage et d’évaluation (SAÉ). Est-ce que les artistes dont vous avez survolé le travail auront influencé votre façon d’approcher l’enseignement des arts?

Cette première partie se voulait une présentation, sous forme narrative, de toutes les possibilités qui vous sont offertes en dehors du cadre scolaire pour s’initier à l’art qui se fait aujourd’hui, apprendre à son contact et réfléchir sur ce vaste sujet. Et maintenant, si on se rendait en classe?

Partie 2 : S’intéresser aux démarches d’artistes
Pistes pour l’enseignement-apprentissage des arts au primaire

Après cette balade dans l’art actuel, en partie 1, on vous propose d’expérimenter de nouveaux chemins avec votre classe.

Chemin 1 : L’observation et la présence

L’artiste a toujours posé, forcément, un regard particulièrement attentif à ce qui l’entoure, pour peindre le paysage, reproduire un portrait, sculpter un corps. Mais l’artiste, aujourd’hui, ne regarde plus seulement de cette façon. Comme les quelques artistes dont il est fait mention dans ce chapitre, l’artiste observe avec attention non seulement les humains et autres qu’humains, mais observe et rend visibles les entrelacements de ces trajectoires. Par sa propre présence, l’artiste nous invite à une présence à son art, comme au monde qui nous entoure. Que ce soit dans sa façon d’observer l’environnement naturel ou construit, l’artiste est en relation. Il ou elle observe, dialogue, c’est-à-dire qu’il ou elle utilise le langage de l’art (ses codes, ses matériaux, ses ambitions) pour répondre à ses observations. L’artiste s’inspire de phénomènes physiques, chimiques, sociologiques auxquels ses réflexions, ses gestes transformateurs tentent de répondre.

En permettant aux élèves de s’exercer, de s’arrêter, de contempler, on favorise cette présence et ce lien avec l’humain et l’autre qu’humain. Si parfois, en classe, on arrêtait le temps? Et si les périodes d’art transformées en de banales activités récompense du vendredi-après-midi-si-vous-êtes-sages étaient remises à l’ordre du jour des priorités pour le développement de nos enfants, à travers des pauses prévues pour apprécier véritablement des œuvres aussi bien issues de l’humanité (la culture) que de notre environnement (la nature)? S’assurer que nos élèves conservent cette capacité de contempler, de regarder fait aussi partie de notre devoir de personne enseignante.

Suggestion :

S’approprier la compétence 3 et s’y exercer en tout temps!

En arts, et à tout moment, on peut exercer son regard. On en profite pour faire des liens avec les savoirs disciplinaires : on regarde et on nomme. Les formes, les lignes, les couleurs, les textures, la composition, etc. Il peut être bon de le faire nous aussi, souvent, devant les élèves, sans que l’exercice soit explicitement nommé. Pratiquer son regard, être présent et présente, cela peut se vivre en toutes circonstances. Apprécier une œuvre d’art, c’est entrer en relation avec l’art. Les causeries autour de l’art sont une façon d’aiguiser le regard. Je vous invite à élargir le champ des possibles par rapport à ces moments de causerie. En phase d’inspiration (PFEQ, 2006, p. 193) d’un projet, n’hésitez pas à aller dehors pour observer, avec tous les sens, et inviter vos élèves à nommer leurs observations9.

 

Chemin 2 : Des pratiques in situ

S’intéresser à la communauté dans laquelle est située notre école et envisager des projets ancrés dans son environnement avec les gens qui l’habitent, c’est soutenir la troisième visée du PFEQ en lien avec le développement du pouvoir-agir. « In situ » est une locution latine qui signifie « dans son milieu naturel » ou « dans une situation ». Une œuvre d’art in situ est créée dans un lieu spécifique et tient compte des éléments qui constituent ce lieu. Ainsi, elle offre une belle façon de pratiquer le regard et la présence des élèves.

Suggestion :

Apprécier une œuvre in situ à caractère social qui parle aussi d’écologie et conceptualiser une œuvre en s’inspirant de la démarche de l’artiste.

Une œuvre à apprécier avec les élèves et qui saura vous inspirer :

Les Particules10 de Wartin Pantois

En dialogue avec le Port de Québec et à l’Incinérateur de Québec! Cette œuvre est issue d’une démarche de médiation culturelle lors de laquelle les citoyen.e.s de Limoilou ont été convié.e.s à donner forme aux particules dans l’air qu’ils respirent. L’initiative s’inscrit au sein d’une mobilisation continue de plus d’une décennie, au fil de laquelle les résident.e.s du quartier et leurs allié.e.s réclament des actions concrètes afin de lutter contre la pollution atmosphérique et de garantir aux Limoulois.e.s le droit de vivre dans un environnement sain. WARTIN PANTOIS – ART : EXTÉRIEUR

Avec la technique du collage (photos des sites environnants et des gens de la communauté), s’inspirer de la démarche de l’artiste et proposer une maquette d’une réalisation plastique à caractère social ou environnemental.

 

Chemin 3 : La communauté

S’intéresser à son environnement et imaginer un projet ancré dans la communauté.

Suggestion :

Partir à la recherche des lieux significatifs de l’environnement de l’école, lieux construits et éléments de la nature, et penser à un projet qui saurait relier les gens entre eux et à leur environnement et mettant en valeur un élément de la nature environnante.

Inspirons-nous de projets école-communauté comme ceux-ci et mobilisons les partenaires externes de l’école!

TISSER/TEXTER de Gabrielle Bélanger

Tisser/texter | gabrielle bélanger (gabriellebelangerartiste.com)

Le temps suspendu, avec Nadia Loria Legris et Anne-Marie Auclair

Bilan VitaCité à la Maison des arts et de la culture de Brompton (youtube.com)

 

Chemin 4 : Des pratiques interactives

Considérant que l’artiste en art actuel utilise les matériaux de son époque, il va de soi que les technologies numériques sont au cœur de plusieurs de ces pratiques (voir Caroline Gagné, Rosalie D. Gagné et Rafael Lozano-Hemmer cités précédemment). Surveillez la programmation des centres d’artistes et des musées contemporains qui vous ont toujours semblé plus obscurs. Vous habitez ailleurs que dans un grand centre? Internet regorge de vidéos qui vous permettront de faire l’expérience d’une œuvre numérique ou de visionner des performances qui émerveillent. Du côté de l’art numérique, de magnifiques opportunités s’offrent à vous. Vous pensez que l’on s’éloigne d’un rapport écologique au monde? Je vous invite à vous poser les questions suivantes : vivre une expérience dans laquelle vous changez votre rapport à l’œuvre en tant que public peut-il aider à changer votre rapport à l’environnement (ce qui vous entoure dans l’immédiat)? Faire l’expérience d’une œuvre tactile et sonore qui affecte plusieurs de vos sens à la fois peut-il vous ramener dans un rapport sensoriel à un environnement immédiat dans lequel n’est pas impliqué un dispositif numérique? En classe, n’hésitez pas à présenter des extraits d’œuvres numériques qui parlent de notre rapport au monde pour amorcer une discussion, à tout moment, peu importe le domaine d’apprentissage à l’horaire. C’est permis! Et c’est plus représentatif de notre réalité; habituez vos élèves à voir que l’art est partout et parle de tout.

Suggestion :

Présenter une œuvre qui utilise le numérique pour apprécier l’environnement

Ballet de drones au mont Fuji : MT FUJI DRONE LIGHT SHOW | SKYMAGIC (youtube.com)

Cette œuvre est parfaite pour présenter l’hybridité des techniques traditionnelles-contemporaines, (et pour parler du caractère in situ d’une œuvre). À écouter dans le noir, et avec du son, pour pratiquer la compétence 3 (« Apprécier des œuvres d’art, des objets culturels du patrimoine artistique, des images médiatiques, ses réalisations et celles de ses camarades »).

Pourquoi ne pas, ensuite, proposer aux élèves la conception (théorique) d’un projet de ballet de drones avec un symbole important du paysage québécois? Intégrer la danse, la musique?

Autre artiste inspirant qui utilise la projection lumineuse (mapping) :

Philipp Frank – Video and Lightart (philipp-frank.com)

 

Conclusion

Les élèves doivent faire l’expérience de l’art, de même que les personnes qui leur enseignent. Se cultiver, en tant qu’adulte, nous permet de mieux comprendre les mécanismes qui nous font apprécier l’art et peut certainement nous aider à mieux le communiquer aux enfants. Vivre plus souvent l’émerveillement devant un art qui surprend, questionne et étonne vous donnera probablement envie de mettre en place des expériences artistiques qui seront significatives pour vos élèves aussi. Il importe également de changer les paradigmes associés aux arts à l’école. Pourquoi l’art pratiqué aujourd’hui à l’extérieur des murs de l’école ressemble si peu à ce que l’on fait en classe? En amorce de ce manuel, Mélanie Champoux pose la question : « À quoi pourrait ressembler une approche culturelle de l’enseignement conçue au prisme des rapports écologiques au monde? » Puis, elle propose les pistes suivantes : 1) Une pédagogie de la rencontre et de la relation; 2) Des valeurs relationnelles, une conscience critique et des habiletés de cocréation; 3) Des stratégies pédagogiques transdisciplinaires, expérientielles, affectives et sensibles.

Dans le contexte de l’enseignement de l’art, proposer des activités modélisées sur la démarche d’artistes en art actuel (à travers les trois compétences du PFEQ) peut permettre de répondre aux trois pistes proposées dans les fondements du présent manuel. En faisant l’exercice de vous tourner vers la démarche des artistes cités dans ce chapitre, vous y trouverez tout ça : relation, rencontre, conscience critique, cocréation, transdisciplinarité, expérience, affection et sensibilité. Les quatre chemins proposés dans ce chapitre ont aussi quelque chose en commun : ils proposent l’illustration de la pédagogie du lieu, en toute cohérence avec une approche culturelle vécue dans un rapport écologique au monde :

« Woodhouse et Knapp (2000) établissent les caractéristiques de la pédagogie du lieu comme le fait qu’elle 1) émerge des attributs particuliers d’un milieu, 2) est interdisciplinaire de nature, 3) est expérientielle, 4) reflète une philosophie de l’éducation plus large qu’apprendre pour performer, et 5) connecte le milieu, le soi et la communauté. Cette pédagogie conteste également le rôle de la classe comme lieu exclusif d’apprentissage » (Cité dans Campeau, 2021, p. 57).

 

À vous maintenant de prendre le temps, avec les élèves, d’entrer en relation avec le monde proposé par l’artiste afin « d’accueillir l’empathie déclenchée par l’œuvre, de sonder la source derrière ces émotions et d’engager les élèves dans une démarche réflexive leur permettant de définir les enjeux sociétaux soulevés et de réfléchir à leur possible pouvoir d’action » (De Oliveira et Trudel, dans Morel, 2023, p. 48).

Notes de bas de page

1- L’artiste en art actuel travaille non seulement avec les médiums et matériaux de son temps, mais s’intéresse aussi aux préoccupations de la société actuelle. On dit même souvent que ces artistes sont en avance sur leur temps. La plupart des artistes qui œuvrent en art actuel sont d’ailleurs en relation avec le monde dans un rapport écologique.

2- Je fais référence ici au fait que parfois, on a tendance à prendre des raccourcis pour pouvoir cocher la case « Environnement et consommation ».

3- Présentation française du projet, Walkscape — Roadsworth

4- Idem.
5- Détails supplémentaires : « Grâce à un système électronique sensible, l’ensemble a la capacité de “ressentir” la présence humaine et d’y réagir spontanément. À la manière d’organismes vivants, les cellules électroluminescentes gonflables s’activent à l’approche des visiteurs : elles se contractent et se gonflent, se trémoussent et s’illuminent avec plus d’ardeur puis, en une vague indolente, propagent leur agitation à l’écosystème entier. En imitant des phénomènes naturels par l’usage de matières et de systèmes artificiels, un procédé nommé “biomimétisme”, l’œuvre interroge l’interaction entre les mondes organiques et technologiques tout en sondant les dynamiques qui fondent leurs rapports ambigus. » Tiré de : RÈGNE ARTIFICIEL IV de Rosalie D. Gagné, Grand Théâtre de Québec (grandtheatre.qc.ca).

6- Meryl McMaster. Passages, migration et nature, Musée des beaux-arts du Canada.
7- Voir L’art comme expérience, John Dewey.
8- Théo Jansen. Sculpteur de vent.

9- Belle occasion aussi de changer le paradigme et confronter les étudiants et les élèves quant à leurs croyances au sujet de ce que devrait être l’enseignement des arts plastiques à l’école. Car, pour plusieurs, il est encore associé à un modèle moderniste centré sur « faire de l’art » et, dans une moindre mesure, « réfléchir et parler d’art » (Trudel et coll., 2017).

10- Voir photos sur le site officiel de l’artiste. Détails sur l’œuvre : Collage collectif, 10 x 13 m, quartier Limoilou, Québec, 2022.

Suggestions de ressources

Pour vous familiariser avec l’art actuel :

Arts & ERE | Pour une reconstruction harmonieuse des rapports à soi, aux autres et au monde (arts-ere.net)

Fondation Grantham pour l’art et l’environnement

REPÈRE : Petit guide pour regarder, questionner, apprécier l’art contemporain (centrebang.ca)

Resilience (resilienceproject.ca)

Sites internet des artistes cités :

Gabrielle Bélanger
gabrielle bélanger | artiste de proximité (gabriellebelangerartiste.com)

Rosalie D. Gagné
rosaliedumont-gagne.com

Philipp Frank
philipp-frank.com

Caroline Gagné
Caroline Gagné (carolinegagne.ca)

Chantal Harvey
Chantal Harvey | Artiste graveure

Theo Jansen
Theo Jansen (strandbeest.com)

Rafael Lozano-Hemmer
lozano-hemmer.com

Meryl McMaster
merylmcmaster.com

Wartin Pantois
WARTIN PANTOIS – ART : PRÉSENTATION

Roadsworth
roadsworth.com

Patsy Van Roost
patsyvanroost.com

Références

Campeau, D. (2021). Pédagogie autochtone et pédagogie du lieu : proposition d’un modèle d’enseignement autochtonisé. Éducation et francophonie, 49(1), 52-70. https://doi.org/10.7202/1077001ar

De Oliveira, A. et Trudel, M. (2023). L’appréciation de l’art actuel pour contrer les préjugés en classe d’arts plastiques au primaire et au secondaire : une perspective empathique et critique. Dans M. Morel (dir.), Éduquer aux enjeux sociétaux par les arts et la littérature (p. 39 à 50). Peisaj. http://collections.banq.qc.ca/document/enRExqos9us3Wn9XYxTGUw

Deslauriers, A. (2022). Modélisation d’une pratique en enseignement des arts plastiques au secondaire dynamisée par des questions socioécologiques : artographie et anasynthèse [thèse de doctorat, Université du Québec à Montréal, Canada].

Dewey, J. (2010). L’art comme expérience. Gallimard.

Ministère de l’Éducation. (2006). Programme de formation de l’école québécoise. Enseignement secondaire, premier cycle. Gouvernement du Québec. http://www.education.gouv.qc.ca/fileadmin/site_web/documents/PFEQ/prfrmsec1ercyclev2.pdf 

Trudel, M., de Oliveira, A., Mathieu, É. et Fleury, R. (2017). Cité dans de Oliveira, A. et Trudel, M. (2023). L’appréciation de l’art actuel pour contrer les préjugés en classe d’arts plastiques au primaire et au secondaire : une perspective empathique et critique. Dans M. Morel (dir.), Éduquer aux enjeux sociétaux par les arts et la littérature (p. 39 à 50). Peisaj. http://collections.banq.qc.ca/document/enRExqos9us3Wn9XYxTGUw

Woodhouse, J. L. et Knapp, C. E. (2000). Place-Based Curriculum and Instruction: Outdoor and Environmental Education Approaches. ERIC Clearinghouse on Rural Education and Small Schools.

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