5.4. Les principes pédagogiques favorables au développement du savoir-être

La majorité des jeux et des activités ludiques présentés dans ce manuel s’inscrivent dans une perspective socioconstructiviste des apprentissages. En ce sens, la dimension sociale et plus spécifiquement les interactions sociales vécues dans le contexte de classe sont considérées comme une composante essentielle du processus de construction des connaissances. Ainsi, la construction du savoir-être, bien que personnelle, s’effectue dans le cadre social d’une activité ludique où les interactions avec les autres soutiennent la réflexion personnelle et collective (Kozanitis, 2005). Les activités permettent de susciter des discussions et des réflexions sur le savoir-être à développer dans sa pratique. Elles deviennent également des exemples d’activités que les personnes étudiantes pourraient réaliser dans le contexte de leur futur emploi. En effet, lorsque les jeux visent à représenter une réalité du monde professionnel, les personnes étudiantes apprennent à mobiliser un savoir-être par la pratique (Frenay et Bédard, 2004), mais aussi à acquérir des ressources tangibles, créatives et ludiques qu’ils pourront transférer dans leur pratique. Les activités vécues en contexte de classe leur permettent d’avoir accès à des idées pour tenir compte de la dimension affective dans des actions professionnelles ultérieures (Lafortune, 2000).

La figure suivante illustre les principes pédagogiques favorables au développement du savoir-être:

Rendre les étudiants actifs

Par leur nature expérientielle, les activités ludiques ou les jeux permettent d’apprendre autrement, en faisant, en observant et en réfléchissant. L’apprentissage expérientiel est présent quand les personnes étudiantes sont dans l’action, qu’elles observent des changements dans leurs connaissances, leurs attitudes ou leurs habiletés et qu’elles effectuent une réflexion consciente sur l’expérience vécue. Les activités ludiques permettent de mettre la personne étudiante en action pour l’amener à développer ses compétences (St-Pierre et al., 2014). Pour favoriser le développement du savoir-être il importe de placer les étudiants dans des situations d’apprentissage authentique où ils exercent leur jugement sur les attitudes, valeurs, émotions. Ainsi, des activités qui amènent les personnes étudiantes à comparer ou confronter leurs idées, à expliquer, à modéliser ou à créer sont susceptibles de favoriser le développement de compétences liées au savoir-être (Hovington et al., 2020).

Illustration d'une feuille de papier qui présente la question suivante: Comment faire pour favoriser l’apprentissage actif chez les personnes étudiantes? Les trucs suivants sont ensuite présentés en points de forme: Inciter la personne étudiante à s'engager activement dans l’activité, à poser des questions, à expérimenter, à résoudre des problèmes, à être créative et à donner un sens à son apprentissage; Proposer des activités qui permettent aux personnes étudiantes de s’engager sur plusieurs plans, intellectuellement, émotionnellement, socialement et physiquement; Offrir la possibilité aux personnes étudiantes d'explorer et d'examiner leurs propres valeurs; Structurer le déroulement des activités, assurer la sécurité émotionnelle et faciliter le processus de réflexion. Reconnaître et encourager les occasions spontanées d'apprentissage

Favoriser et tirer profit des interactions

La dimension sociale et les interactions sociales vécues dans le contexte d’une activité ludique sont considérées comme une composante essentielle du processus de construction des apprentissages. Ces interactions sont susceptibles de créer des conflits sociocognitifs qui permettent de négocier le sens à donner à l’expérience vécue lors de l’activité (Ménard et St-Pierre, 2014). Par exemple, pendant ou à la suite de l’expérimentation d’une activité de nature ludique, les personnes étudiantes peuvent prendre conscience des similitudes et des différences entre leurs représentations et celles des autres et s’interroger sur leur propre expérience de jeu. Lors de la participation à une activité de groupe, les personnes étudiantes sont appelées à se faire confiance et à s’engager dans des activités collaboratives contribuant ainsi au climat d’apprentissage. En ce sens, les activités ludiques favorisent une activité cognitive et affective à travers des interactions entre les étudiants (St-Pierre et al., 2014).

Illustration d'une feuille de papier qui comprend la question suivante: Comment faire pour favoriser et tirer profit des interactions? Les trucs suivants sont présentés en points de forme: Favoriser les interactions entre les personnes étudiantes lors de la réalisation des activités; Laisser place à l’expression des différences; Sélectionner des jeux qui encouragent la collaboration, la communication et la pensée critique. Les jeux de rôle, les jeux de société et les jeux de simulation sont souvent efficaces à cet égard; Créer des équipes hétérogènes en termes de compétences, d'aptitudes et de personnalités. Cela encourage la coopération entre les personnes étudiantes et favorise l'apprentissage mutuel; Poser des questions ouvertes pour stimuler la réflexion et l'analyse; Fournir une rétroaction constructive; Valoriser la participation de tous. Encouragez un climat de respect mutuel où chaque personne se sent à l'aise de s'exprimer.

Favoriser la réflexion

L’utilisation d’une pédagogie par le jeu permet de développer la capacité réflexive des personnes étudiantes (Frenay et Bédard, 2004). En effet, plusieurs jeux ou activités ludiques sont des occasions de créer des espaces de réflexion et de dialogue pour apprendre dans et sur l’action (Lafantaisie et Dionne, 2023). Elles permettent aux personnes étudiantes de prendre conscience d’émotions et de valeurs qui entrent en jeu dans différentes situations professionnelles (Beckers, 2007). Afin de miser sur la dimension affective des apprentissages, le retour réflexif sur l’expérience vécue est primordial (Sanchez, 2023). En effet, la réflexion sur l’action est une condition importante pour favoriser le transfert des apprentissages (St-Pierre et al., 2014). Pour stimuler la démarche réflexive de la personne étudiante, la personne enseignante peut nommer les émotions ou les valeurs en cause lors d’une activité ou d’un jeu contribuant ainsi à une meilleure compréhension ou à l’émergence d’un savoir-être (Vanpee et al., 2010)

Offrir une rétroaction formative

Les personnes enseignantes peuvent offrir une rétroaction formative en identifiant des points forts et à améliorer et en proposant des moyens précis pour réguler les apprentissages (St-Pierre et al., 2014). Cette rétroaction formative permet aux personnes étudiantes de prendre conscience de l’importance de la dimension affective en contexte d’apprentissage afin qu’elles puissent mieux en tenir compte à leur tour en contexte professionnel. D’ailleurs, en contexte de jeux, l’appui de la personne enseignante et l’intérêt portés au développement du savoir-être contribuent à renforcer chez les personnes étudiantes, les attitudes à privilégier dans l’exercice du métier ou de la profession (Forbes, 2021; Leblanc, 2020).