6.3. Activités et jeux de types coopératifs/collaboratifs

Qu’est-ce qu’on entend par jeux de coopération?

Les jeux de coopération (aussi appelés jeux coopératifs) constituent un moyen pédagogique ludique où les personnes étudiantes s’engagent activement et collectivement dans une activité afin d’atteindre un objectif personnel et contributif au bénéfice commun (Connac et Irigoyen, 2023; Delgado-García et al., 2022; Fillette, 2013). Selon Connac (2022), les jeux de coopération s’appuient sur la pédagogie de la coopération, qui se définit comme « l’ensemble des situations où des élèves (ou des étudiants, des stagiaires, etc.) sont encouragés à agir et à apprendre avec, par et pour les autres, avec l’intention d’un bénéfice individuel » (p.56). Dans cette perspective, les jeux coopératifs permettent aux personnes étudiantes de s’engager physiquement et intellectuellement dans une activité afin d’atteindre un but, réaliser un défi ou consolider des apprentissages, et ce, sans qu’il y ait de personnes gagnantes ou perdantes (Connac, 2022). Les jeux de coopération s’inscrivent donc en contraste aux jeux de compétition, dans lesquels les personnes étudiantes ou les équipes travaillent les unes contre les autres pour remporter le jeu (Connac, 2022; Connac et Irigoyen, 2023).

Qu’est-ce qu’un comportement coopératif?

Connac (2022), présente trois déterminants pour qu’un comportement puisse être qualifié de coopératif :

Une action conjointe (ou combinée) : Les personnes étudiantes se doivent de coordonner leurs actions auprès d’au moins une autre personne. La coopération ne peut être effectuée de manière individuelle. Autrement dit, la coopération intègre inévitablement le travail d’équipe.

Une intentionnalité : Les personnes étudiantes coopèrent dans un but ou un objectif précis.

Un bénéfice individuel mutuel : Le fait de s’engager dans une activité de coopération doit permettre aux personnes étudiantes d’en retirer un avantage individuel, qui est toutefois partagé par les autres personnes étudiantes. Ce bénéfice se positionne quelque part entre l’acquisition d’un bien ou d’un avantage tangible et la quête de satisfaction liée au fait de coopérer.

Est-ce que « collaboration » est synonyme de « coopération »?

D’un point de vue conceptuel, la distinction entre les termes « collaboration » et « coopération » ne fait pas consensus. D’ailleurs, dans plusieurs cas, l’utilisation de ces deux termes est effectuée de manière interchangeable (Baudrit, 2007; Connac, 2022). Cependant, certains auteurs indiquent que des différences résident entre ces concepts et qu’il importe de les considérer (Connac, 2022; Connac et Irigoyen, 2023; Sawyer et Obeid, 2017). En effet, l’acte de collaborer requiert que l’ensemble des membres de l’équipe s’entendent sur les actions à réaliser afin d’atteindre l’objectif commun souhaité. Il est donc possible de parler de collaboration lorsque « des personnes de même niveau cognitif, dont les statuts sont équivalents, sont capables de travailler ensemble dans un but commun. […] L’accent est donc mis sur l’échange entre égaux, sur la justification des idées émises par les uns et les autres au sein du groupe » (Baudrit, 2007, p. 117). La coopération, de son côté, fait davantage référence à l’interdépendance entre les membres de l’équipe qui prennent part à un but commun, mais dans l’optique d’atteindre leurs objectifs individuels (Baudrit, 2007; Connac, 2022; Sawyer et Obeid, 2017). La coopération exige donc que les actions entreprises par les personnes étudiantes s’effectuent dans un même espace socio-temporel, notamment en raison de la division des tâches généralement définie clairement dès le début (Baudrit, 2007; Connac et Irigoyen, 2023). Succinctement, « une relation collaborative est tournée vers des buts communs alors qu’une relation coopérative vise plutôt des intérêts individuels » (Connac et Irigoyen, 2023, p. 4). Cela dit, que l’on parle de collaboration ou de coopération, le travail d’équipe et l’entraide s’avèrent essentiels et au centre des deux approches (Baudrit, 2007).

 

 Les activités proposées dans le cadre de cette REL peuvent faire appel à l’un ou l’autre des concepts.

Objectifs des jeux de coopération

D’ordre général, les objectifs derrière l’utilisation de jeux de coopération touchent principalement à la création d’un climat de cohésion au sein du groupe et au développement du savoir-être requis pour la pratique professionnelle (Delgado-García et al., 2022; Mendo-Lázaro et al., 2018). Plus particulièrement, les jeux de coopération représentent une occasion pour les personnes étudiantes de développer des compétences requises lors de l’entrée sur le marché du travail telles que le travail d’équipe et l’ouverture aux idées des autres (Baudrit, 2007; Mendo-Lázaro et al., 2018). En effet, ce type de jeux permet aux personnes étudiantes de développer leur esprit d’équipe, de favoriser leur engagement, d’adopter une posture de responsabilité partagée, de s’entraider et de se familiariser avec la diversité (Connac et Irigoyen, 2023; Mendo-Lázaro et al., 2018).

Dans un autre ordre d’idées, les jeux de coopération en enseignement supérieur peuvent être utilisés par la personne enseignante pour diversifier ses méthodes d’apprentissage et instaurer un climat de leadership partagé (Connac et Irigoyen, 2023). Ainsi, la personne enseignante n’est plus considérée comme étant l’unique responsable de la transmission des savoirs et de la réponse aux besoins et interrogations des personnes étudiantes (Connac, 2022).

Les avantages des jeux de coopération

Lorsqu’ils sont réalisés en contexte de classe, les jeux de coopération présentent plusieurs avantages. Ils peuvent être employés pour structurer et favoriser l’appropriation de nouveaux apprentissages. En effet, le travail coopératif permet de générer des conflits sociocognitifs chez les personnes étudiantes (Fillette, 2013; Sawson et al., 2019; Sawyer et Obeid, 2017). Par définition, un conflit sociocognitif réfère à un « état de déséquilibre cognitif provoqué chez l’individu par des interactions sociales qui le mettent en contact avec une conception ou une construction différente » (Lafortune et Deaudelin, 2001, p. 2001). Ainsi, recourir à des jeux de coopération dans le cadre de la formation permet aux personnes étudiantes de confronter leur point de vue à ceux de leurs collègues, et ce, grâce aux interactions suscitées par les jeux de coopération. La confrontation d’idées et les remises en question de leurs perspectives sont d’ailleurs bénéfiques pour le développement de compétences liées au savoir-être telles que la communication (ex. : organiser ses idées, oser s’affirmer, justifier et argumenter ses idées avec respect, etc.) et la reconnaissance des opinions d’autrui (ex. : écoute, empathie, bienveillance, etc.). De plus, cette confrontation d’idées offre la possibilité aux personnes étudiantes de réexaminer leurs opinions et leur conception initiale d’un concept ou d’une idée en vue d’effectuer de nouveaux apprentissages (Connac et Irigoyen, 2023; Fillette, 2013).

Les jeux de coopération sont également utilisés puisqu’ils favorisent la motivation intrinsèque des personnes étudiantes en plus d’améliorer le rendement scolaire (Connac et Irigoyen, 2023; Mendo-Lázaro et al., 2018). À cet effet, Sawyer et Obeid (2017) indiquent que plusieurs études démontrent que les personnes étudiantes qui travaillent en petits groupes (comme c’est le cas lors des jeux de coopération) seraient en mesure de développer davantage de connaissances et se verraient plus satisfaites de leurs cours que les personnes qui travaillent de manière individuelle.

(Image inspiré du Réseau Canopé)

Références

Baudrit, A. (2007). Apprentissage coopératif/Apprentissage collaboratif : d’un comparatisme conventionnel à un comparatisme critique. Les Sciences de l’éducation – Pour l’Ère nouvelle, 40(1), 115-136. https://doi.org/10.3917/lsdle.401.0115

Connac, S. (2022). L’école française et les pédagogies coopératives pour apprendre. Revue Internationale D’éducation De Sèvres, 90, 53–62. https://doi.org/10.4000/ries.12745

Connac, S. et Irigoyen, A. (2023). Apprentissage coopératif ou pédagogiques coopératives. Éducation Et Socialisation, 67, 1-23. https://doi.org/10.4000/edso.22840

Delgado-García, M., Conde Vélez, S. et Toscano Cruz, M. de la O. (2022). Cooperative learning at university: Opinion of students and application of the instrument Cooperative Learning Questionnaire (CLQ). Innovations in Education & Teaching International, 59(5), 564–573. https://doi-org.acces.bibl.ulaval.ca/10.1080/14703297.2021.1932557

Fillette, A. (2013). On gagne ou on perd tous ensemble: le jeu coopératif, un support pour développer le savoir-être et le savoir-faire en ULIS [mémoire, Institut Universitaire de Formation des Maîtres]. Collection LILLE-ESPE. https://dumas.ccsd.cnrs.fr/LILLE-ESPE/dumas-00994462v1

Lafortune, L. et Deaudelin, D. (2001). Accompagnement socioconstructivisme : pour s’approprier une réforme en éducation. Presses de l’Université du Québec.

Mendo-Lázaro, S., León-Del-Barco, B., Felipe-Castaño, E., Polo-Del-Río, M.-I. et Iglesias-Gallego, D. (2018). Cooperative team learning and the development of social skills in higher education: the variables involved. Frontiers in Psychology, 9, 1536–1536. https://doi.org/10.3389/fpsyg.2018.01536

Swanson, E., McCulley, L. V., Osman, D. J., Scammacca Lewis, N. et Solis, M. (2019). The effect of team-based learning on content knowledge: A meta-analysis. Active Learning in Higher Education, 20(1), 39–50. https://doi-org.acces.bibl.ulaval.ca/10.1177/1469787417731201

Paul-Cavallier, P. (2008). Jeux de coopération pour les formateurs. Éditions D’Organisation.