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La grande finale

Une personne regarde vers la droite l’air pensif, les sourcils intriqués, et se tient le menton entre l’index et le pousse.

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Étude de cas : Que peuvent faire les leaders pour instaurer un environnement de travail motivant?

(Version modifiée de l’étude de cas originale préparée par Céleste M. Brotheridge)

Cette étude de cas décrit un problème vécu par Roger lors de son premier emploi. En lisant le texte, pensez à ce que le gestionnaire du magasin aurait pu faire pour aider ses employés à se sentir motivés et valorisés.

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Roger avait un problème. Son père célébrait son anniversaire ce samedi, et Roger devait travailler de 16 h à 20 h au magasin. Roger était issu d’une famille tricotée serrée, où tous les jalons familiaux étaient célébrés par un long repas familial. Si Roger se présentait à son quart de travail, il devrait manquer le dîner d’anniversaire de son père. S’il disait qu’il était malade, il ne se sentirait pas honnête, car ce n’était pas vrai. Il était sûr que son superviseur ne lui accorderait pas son congé. Lorsque Roger a commencé ce travail, il avait demandé de ne pas travailler le jour du sabbat. Son superviseur avait simplement déclaré que le planificateur automatique, un programme informatique conçu pour créer les horaires de travail des employés, ne pouvait pas répondre à cela. Il n’y avait pas de place à la discussion. «Combien ce travail vaut-il pour moi de toute façon?», se demandait Roger.

À l’époque, Roger était un étudiant universitaire de 22 ans qui vivait chez ses parents. Voulant éviter les prêts étudiants, Roger avait commencé à travailler au magasin en tant qu’associé dans le centre photo. Comme le magasin était nouveau, tous les associés devaient faire l’objet d’une formation avant qu’il puisse ouvrir ses portes. Chaque associé avait reçu une copie du manuel d’employé révisé par le responsable du magasin. Les associés avaient ensuite regardé une vidéo intitulée Vous avez choisi un excellent endroit pour travailler!, qui décrivait le succès du magasin en tant qu’entreprise. Diverses citations de son fondateur, comme «Si vous voulez une entreprise prospère, vos associés doivent penser que vous travaillez pour eux, et non pas qu’ils travaillent pour vous», étaient répandues généreusement dans la vidéo. Le superviseur avait également décrit les principes du fondateur :

  1. Soyez engagé dans votre travail. Votre passion sera contagieuse pour ceux qui vous entourent.
  2. Traitez les associés en tant que partenaires et soyez un leader serviteur.
  3. Rendez votre travail excitant et motivant en fixant des objectifs élevés, en utilisant la rotation des postes et en encourageant la compétition.
  4. Communiquez autant d’information que vous le pouvez aux associés. Les associés qui possèdent de l’information se sentent habilités à effectuer leur travail et se soucient de l’organisation.
  5. Démontrez votre appréciation sur une base régulière. Les compliments sont inestimables.
  6. Amusez-vous au travail, faites preuve d’enthousiasme et célébrez les succès.
  7. Écoutez vos associés. Ils savent ce que pensent les clients et ils ont des idées sur la façon d’améliorer les opérations.

Roger avait quitté la séance de formation enthousiaste de faire partie de cette équipe. C’était son premier vrai travail, et il était impressionné par l’approche «familiale» dont les gestionnaires avaient parlé pendant la formation. Les gestionnaires avaient encouragé les employés à se passionner pour le magasin, à partager la vision du fondateur et à mettre les besoins du magasin en priorité.

Le magasin a ouvert ses portes, et Roger travaillait dans le centre photo. Au cours de ses quarts de travail de quatre heures, il aidait les clients à imprimer leurs photos. Parfois, il traitait des commandes électroniques reçues des clients pour l’impression de photos. Même si Roger aimait son travail, il le trouvait plutôt routinier. Il attendait avec impatience qu’une machine brise pour la réparer. Il y avait très peu de compétences à maîtriser, et les procédures étaient clairement définies. Roger se rendait compte que les associés pouvaient facilement être remplacés (et ils l’étaient), mais avoir une attitude positive, de l’engagement et un sens du devoir semblait particulièrement important pour l’entreprise.

Cela n’était pas un défi pour Roger, car il avait naturellement une bonne attitude. Il pensait toujours le meilleur d’autrui. Il avait donc simplement écarté ses doutes quant à son travail en se disant qu’ils n’avaient pas d’importance. Après quelques semaines, cependant, Roger a commencé à remarquer que ses collègues se plaignaient des horaires de travail, de la gestion et des façons de faire. Depuis que son superviseur l’avait critiqué pour avoir suggéré de nouvelles procédures, Roger pensait qu’il valait mieux se taire. Quand il avait une idée, il pensait à une ligne d’un poème qu’il avait lu au lycée, The Charge of the Light Brigade : «Ils ne doivent pas répondre, ils ne raisonnent pas, ils ne font que faire et mourir.» Alors que Roger avait autrefois l’habitude d’en faire plus que ce qui était demandé, maintenant, il ne faisait que le strict minimum attendu par son superviseur pour garder son emploi. Il se disait que le magasin était un moyen à une fin, tout comme il était un moyen pour le magasin. Il était heureux de continuer ses études pour trouver par la suite un meilleur endroit où travailler. Il était désolé pour les personnes qui n’avaient pas d’aspirations ou pas d’autres choix que de rester au magasin. Dans un an ou deux, il deviendrait professionnel et il aurait un emploi plus payant que ce dont il pouvait rêver. Plus important encore, il avait le choix; les autres n’en avaient pas beaucoup.

Au bout d’un an, la plupart des gens qui avaient commencé en même temps que Roger avaient démissionné. Il y avait plus d’importance accordée aux règles qu’aux personnes. Par exemple, les employés du centre photo n’étaient pas autorisés à s’apporter des boissons. En outre, bien que les employés pussent développer eux-mêmes un calendrier réalisable pour les vacances, le superviseur l’avait refusé parce que le planificateur automatique «ne le permettrait pas». Les exceptions, la négociation et l’assouplissement de certaines règles étaient impossibles.

Il y a eu d’autres incidents marquants pour Roger. Après avoir dressé un inventaire pendant de nombreuses heures, un associé nommé Jim est sorti à l’extérieur du magasin pour sa pause-café. Une fois de retour au travail, il a remarqué qu’il avait laissé son lecteur d’inventaire électronique à l’extérieur. Alors, Jim est sorti le chercher pour le récupérer où il l’avait laissé. Or, quand il est retourné dans le magasin, son superviseur l’a apostrophé en lui indiquant qu’un associé ne pouvait pas prendre deux pauses et que cet avertissement formel serait consigné dans son dossier. Jim a démissionné de son travail le même après-midi.

À son dernier jour de travail, une autre associée, Judy, est entrée au magasin avec un short kaki. Son superviseur s’est précipité vers Judy, l’a arrêtée à quelques pas de la porte, a utilisé son badge pour mesurer son short et lui a dit de rentrer à la maison pour se changer parce que son short était trop court («plus que la longueur d’un badge au-dessus des genoux»). Judy est rentrée à la maison, mais elle n’est pas revenue au travail.

De même, Colette, une caissière, s’est jointe à la réserve de l’armée et a informé le magasin qu’elle aurait besoin d’une fin de semaine sur trois de congé. Colette a pensé que cette indisponibilité mineure pourrait être introduite dans le planificateur automatique et que tout irait bien. Même pendant les semaines où elle ne pouvait pas travailler la fin de semaine, elle était tout de même disponible 30 heures par semaine. Toutefois, son superviseur l’a informée qu’elle devrait faire un choix entre l’armée et le magasin. La demande de congé exceptionnel de Colette a également été refusée par son superviseur. Peu de temps après, Colette a été renvoyée, même si elle faisait du très bon boulot et qu’elle avait reçu une reconnaissance pour son excellent service à la clientèle.

Un autre incident : Michel avait demandé des vacances pendant la première semaine d’août afin de participer à son voyage familial annuel. Même s’il avait soumis sa demande quatre mois à l’avance, son superviseur a attendu jusqu’à la mi-juillet pour l’informer qu’il ne pouvait trouver personne pour le remplacer et que, par conséquent, il devait être présent au travail ou il perdrait son emploi. Michel a décidé de manquer ses vacances en famille. Il ne voulait pas travailler à un autre endroit qui payait moins que le magasin (environ deux dollars de moins par heure).

Ce jour-là au travail, Roger était particulièrement anxieux. En plus de devoir prendre une décision concernant le dîner d’anniversaire de son père, Roger était préoccupé par un article qu’il avait vu en naviguant sur Internet. Plusieurs sites Web déclaraient que le magasin était poursuivi en moyenne de deux à cinq fois par jour par les clients, les employés et les autres parties prenantes. Bien que la plupart de ces sources fussent des documents judiciaires, Roger était dubitatif. Après tout, il est raisonnable de s’attendre à ce que toute organisation subisse ce genre de problèmes, en particulier une entreprise aussi importante que le magasin. En fait, il se pourrait bien que le magasin soit la cible de moins de procès que les autres entreprises qui ont la même taille. Toutefois, après avoir réfléchi à ce qui se passait dans son propre lieu de travail, Roger ne savait plus quoi penser.

Le cas qui a vraiment été marquant pour Roger portait sur la discrimination religieuse. Un gestionnaire du magasin, qui était mécontent de la réticence d’un adventiste du septième jour à travailler pendant son sabbat, lui avait fait des commentaires désobligeants. Il avait fourni un compte rendu inexact d’une infraction commise par l’associé religieux et un de ses collègues (accéder au système informatique de l’entreprise en utilisant le mot de passe réservé à la gestion). L’employé religieux avait été congédié, mais pas son collègue qui ne pratiquait pas de religion.

Quoi qu’il en soit, Roger devait aller travailler aujourd’hui. En entrant dans le magasin, il se sentit surveillé et épié. Il se précipita dans les toilettes, mais cela lui rappela un cas dans lequel un superviseur du magasin avait installé secrètement une caméra dans les toilettes dans le but d’attraper des voleurs à l’étalage. Deux associés disaient que cela était envahissant, et les tribunaux étaient d’accord. Après avoir jeté un coup d’œil au plafond, Roger se glissa dans la salle à manger des associés.

Les murs de la salle à manger étaient tapissés d’affiches contenant des slogans tels que «Nos gens améliorent les choses» et «Les associés sont des partenaires». Sur la table, il y avait une boîte de noix de cajou ouverte. Malgré le fait que Roger et ses collègues avaient normalement l’habitude de manger n’importe quelle nourriture qui se trouvait sur la table de la salle à manger, cette fois-ci, Roger a murmuré : «Je serais fou d’en manger!» Il s’est rappelé un autre cas où le magasin avait été condamné à payer 20 millions de dollars en dommages et intérêts à quatre associés pour diffamation, surveillance abusive et conduite scandaleuse. Un superviseur qui était préoccupé par le vol dans le magasin avait mis en place une caméra vidéo dans la salle à manger des associés et il avait placé plusieurs boîtes de noix ouvertes sur la table en guise d’appâts. Après avoir visionné la vidéo, il avait congédié quatre associés sans préavis. Au cours du procès qui en a résulté, un autre superviseur avait déclaré que les emballages ouverts de noix et de bonbons étaient régulièrement donnés à des organismes de bienfaisance ou aux associés. «Qu’est-ce qui se passe ici?», s’interrogea Roger. «Si c’est ainsi qu’un détaillant géant traite ses employés, à quoi dois-je m’attendre pour le reste de ma carrière? Peut-être ai-je trop d’attentes? Après tout, ce n’est qu’un travail.»

Roger retourna à son poste de travail et tenta de ne plus s’interroger sur les pratiques du magasin. Or, une question revenait sans cesse : «Que devait-il faire au sujet du dîner d’anniversaire de son père?» Roger envisageait ses options quand il se dit : «Ou… devrais-je laisser mon poste environ 30 minutes et demander à mes collègues de me couvrir?»

Questions de réflexions

Nous vous invitons à réfléchir aux questions suivantes.

  • Comment décririez-vous le climat de travail au magasin?
  • Si vous étiez le gestionnaire du magasin, comment répondriez-vous au dilemme de Roger?
  • En tant que gestionnaire du magasin, que feriez-vous pour créer un environnement de travail motivant?
  • Quelles leçons importantes avez-vous tirées de cette étude de cas?

 

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101 exercices pour développer votre leadership Droit d'auteur © 2024 par Céleste Grimard est sous licence Licence Creative Commons Attribution 4.0 International, sauf indication contraire.