Le quatrième fondement
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Êtes-vous conscient de vos attitudes envers les autres ?
« Qu’est-ce qu’une attitude ? Elle est notre vrai moi en évolution. Elle cache ses racines, mais révèle ses fruits. Elle peut être notre meilleure alliée ou notre pire ennemie. Plus honnête et plus constante que nos paroles, elle reflète un regard extérieur basé sur nos expériences passées. Elle influence nos interactions, attirant ou repoussant les gens. Elle ne trouve satisfaction que dans son expression. Elle garde la mémoire de notre passé, parle pour notre présent et prophétise notre avenir. » – John Maxwell
Êtes-vous un X ou un Y ? Nous ne parlons ni d’algèbre ni de générations ni d’un langage codé ici. Il s’agit plutôt de la théorie classique et toujours pertinente de Douglas McGregor, qui postule deux types de présomptions sur la nature humaine, la théorie X et la théorie Y.
Voici les principaux postulats de la théorie X :
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Les individus sont naturellement paresseux et n’aiment pas le travail. Pour eux, travailler n’est pas une source de joie ni de fierté, mais plutôt une contrainte pénible. S’ils en avaient le choix, beaucoup préféreraient éviter le travail pour se soustraire au stress et aux frustrations.
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Sans contrôle strict et sanctions, les individus ne fournissent pas d’efforts importants dans leur travail. Même avec des récompenses promises pour un travail bien fait, ils ne sont pas motivés à donner le meilleur d’eux-mêmes. Seules des mesures coercitives et des menaces peuvent les inciter à travailler efficacement.
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Les individus ont besoin d’être dirigés de manière autoritaire. En raison d’un manque d’ambition et d’intérêt pour leur travail, ils évitent les responsabilités et préfèrent suivre les directives d’une figure d’autorité paternaliste. Ils sont plus enclins à obéir à quelqu’un qu’à prendre des initiatives.
Qu’en pensez-vous pour l’instant ? Cela reflète-t-il votre perception des gens, voire de vous-même ?
Voici les principaux postulats de la théorie Y :
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Le travail et les efforts qu’il implique sont naturels pour les individus. Les êtres humains peuvent trouver une satisfaction intrinsèque dans leur travail, étant motivés par le désir de se dépasser, de s’épanouir et de réaliser leur plein potentiel. S’engager dans une carrière pour contribuer à quelque chose de plus grand qu’eux-mêmes est une aspiration naturelle. Ainsi, les individus recherchent des occupations qui les intéressent et les passionnent.
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Les individus possèdent une capacité d’autocontrôle qui leur permet d’atteindre leurs objectifs. Ils sont capables de planifier leur travail de manière à obtenir des résultats importants. Ils aiment l’autonomie et peuvent être motivés par des récompenses contingentes, aussi simples que la satisfaction personnelle découlant du travail accompli.
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Les individus trouvent gratifiant de se voir confier des responsabilités au travail. Ils cherchent activement à évoluer, à se perfectionner et à développer leurs compétences en apprenant de nouvelles choses et en acquérant de nouvelles aptitudes. Ainsi, ils aspirent à assumer des responsabilités qui enrichissent leur expérience et leur savoir-faire.
Comment ces hypothèses vous conviennent-elles ? Lesquelles vous décrivent le mieux ?
Ce sont nos actions envers les autres qui révèlent notre véritable croyance sur la nature humaine. Par exemple, de nombreux gestionnaires affirment valoriser la participation de leurs collaborateurs au bureau, mais leurs actions suggèrent souvent une préférence pour les décisions unilatérales. Ainsi, pour identifier nos valeurs fondamentales, il suffit de réfléchir à nos actions (et non l’inverse !). Nous passons notre quotidien à investir dans des activités que nous aimons avec les personnes que nous estimons, tandis que nous ignorons souvent celles et ceux que nous ne valorisons pas.
Quelle que soit la vision adoptée, il est crucial d’ajouter une notion importante : celle des prophéties autoréalisatrices, également connues sous le terme « effet Pygmalion ». Selon Richard Field et David Van Seters, il s’agit d’une situation classique où une fausse croyance initiale entraîne un comportement qui finit par rendre cette croyance vraie. Illustrons cela avec deux exemples, un pour la théorie X et un pour la théorie Y.
Imaginons qu’un leader croit que les membres de son équipe sont tous des individus incompétents qui évitent le travail et prolongent délibérément leurs pauses-café. C’est sa perception. En réaction à cette croyance, le leader pourrait adopter des comportements de surveillance et de contrôle stricts, parlant aux subordonnés de manière abrupte et exigeant des comptes détaillés de leurs tâches. Ce traitement peut offenser les membres de l’équipe, les poussant à se désengager, à s’absenter davantage et même à se rebeller contre ces mesures, confirmant ainsi involontairement les attentes initiales du leader.
Le deuxième exemple, basé sur la théorie Y, pourrait se matérialiser ainsi : un leader souhaite voir ses collaborateurs se développer et exceller. Lors d’une réunion d’équipe, il exprime : « Vous êtes de loin la meilleure équipe que j’ai eu l’occasion de diriger ! » Quel effet cela pourrait-il avoir ? Pensez à l’action et à la réaction. L’équipe pourrait commencer à adopter des comportements plus efficaces et proactifs, améliorant ainsi ses performances. La prophétie positive énoncée par le leader se réalise, transformant effectivement l’équipe en un groupe de haut niveau.
Face à ces exemples, où vous situez-vous ? Bien que ces visions de la nature humaine soient dichotomiques, dans la pratique, nous adoptons souvent un mélange des deux attitudes. En effet, certains chercheurs suggèrent qu’une approche principalement fondée sur la théorie Y, avec une touche de théorie X lorsque nécessaire, permet d’obtenir une perspective plus équilibrée. Brian Kreissl souligne que l’utilisation d’un style de gestion plus directif basé sur la théorie X peut être nécessaire lorsqu’il y a un défi d’autorité ou lorsque les circonstances exigent une prise de décision rapide et un contrôle plus strict. Il est également vrai que certaines personnes préfèrent être dirigées et ne se sentent pas à l’aise avec l’autonomie ou la responsabilité décisionnelle.
Votre défi
Cette semaine, nous vous invitons à observer attentivement vos attitudes envers les autres lors d’au moins trois interactions avec des personnes que vous dirigez ou qui ont moins d’autorité que vous. Après chaque interaction, prenez un moment pour vous poser les questions suivantes et notez vos réponses dans votre journal d’apprentissage.
- Que révèlent mes actions sur mes présomptions à l’égard des personnes ? Expliquez votre réponse.
- Mes actions suggèrent-elles que je suis optimiste et que je pense que les gens sont responsables, dignes de confiance et respectables ? Expliquez votre réponse.
- Mes actions laissent-elles penser que je perçois les gens comme paresseux, malhonnêtes ou indignes de mon attention ? Expliquez votre réponse.
Réflexion
Répondez aux questions suivantes dans votre journal d’apprentissage.
Sur une échelle de 1 à 10, dans quelle mesure, selon vous, la théorie représente-t-elle votre façon de penser les gens ? Justifiez votre note.
- Cet exercice était-il facile ou difficile à faire ? Pourquoi ?
- Que révèlent vos actions sur vos présomptions sur la nature des personnes ?
- Décrivez un moment où quelqu’un vous a traité d’une manière conforme à (a) la théorie X et à (b) la théorie Y. Quelles ont été vos réactions ? Comment ses présomptions ont-elles influencé votre comportement ?
- Dans quelles circonstances pensez-vous que les présomptions de la théorie X peuvent être nécessaires ?
- Quelles leçons avez-vous tirées de cet exercice ?
- Comment pouvez-vous profiter des prophéties autoréalisatrices dans votre vie personnelle et professionnelle ?
- Que peuvent faire les leaders pour garantir que leurs attitudes ont un impact positif sur les membres de leur équipe ?
- Comment les leaders peuvent-ils aider les membres de leur équipe à devenir plus conscients de l’impact de leurs présomptions sur les autres ? Un leader doit-il sensibiliser les membres de son équipe à l’importance des théories X et Y dans leur travail et leur vie personnelle ?
Plan d’action
Dans votre journal d’apprentissage, décrivez trois actions spécifiques que vous entreprendrez dès maintenant pour (a) devenir plus conscient de l’impact de vos présomptions et de vos attentes sur les autres, pour (b) développer des croyances de type Y plutôt que X et pour (c) agir selon vos croyances en vous assurant que vos gestes sont cohérents avec votre pensée.
Roger : Je crois fermement que l’attitude d’un leader influence directement les personnes qui l’entourent. S’il croit en la capacité et la fiabilité des autres, ses collaborateurs seront encouragés à se comporter de manière responsable. En revanche, s’il part du principe que les gens sont paresseux, il risque de voir de la paresse partout. Qu’en penses-tu ?
Roxanne : Oui, même si c’est un peu simpliste (parce que certains individus sont effectivement paresseux), je suis d’accord avec toi ! Le leader doit adopter une attitude optimiste et reconnaître les différences individuelles pour encourager chacun à s’améliorer de manière positive et constructive. Chaque personne a ses qualités et ses défauts, mais il est rare que quelqu’un agisse intentionnellement de mauvaise foi. En voyant les autres comme responsables, le leader est plus susceptible de les impliquer pleinement.
Roger : Ça me rappelle mon ancien patron. Il m’a jugé trop rapidement et n’a pas cherché à changer d’avis par la suite. Je pense que les leaders devraient vraiment prendre le temps de connaître les gens pour valider ou ajuster leurs premières impressions. C’est une pratique essentielle pour un leadership efficace, à mon avis. Parfois, je fais une mauvaise première impression, mais lorsque les gens me connaissent mieux, ils se rendent compte que je suis une bonne personne. Qu’en penses–tu ?
Roxanne : Oui, absolument. Je recommande aux leaders d’éviter le biais de confirmation, qui consiste à chercher des informations confirmant leurs attentes. Au lieu de ça, ils devraient activement rechercher des preuves qui pourraient invalider ces attentes. Par exemple, s’ils pensent que quelqu’un est paresseux, ils devraient chercher des occasions où cette personne travaille avec acharnement. C’est ainsi que l’on peut réellement comprendre et encourager le potentiel de chacun.