Le premier fondement
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Avez-vous des idées préconçues sur ce qu’est le leadership ?
« Quand l’expérience infirme l’idée préconçue, l’expérimentateur doit rejeter ou modifier son idée. » – Claude Bernard
« Ne soyez pas coincé dans de vieilles idées. Continuez à reconnaître que la réalité change et que vos idées doivent changer. » – Grace Lee Boggs
Vous n’êtes pas seul : nous avons tous des idées sur ce qu’est le leadership. Que ce soit par le biais des médias, de nos impressions ou encore de notre entourage, nous accumulons bon nombre d’informations (pas toujours exactes !) sur le leadership. Il est normal de tomber dans le panneau parfois, mais pas trop souvent quand même.
Les leaders formidables osent valider les informations reçues en cherchant des appuis dans la réalité. Ils testent leurs hypothèses afin de s’assurer que ce qu’ils pensent est véridique. Ils sont donc sensibilisés au fait que le monde qu’ils perçoivent n’est pas tout à fait identique à la réalité. Sachant cela, les leaders s’appuient sur des faits avant d’émettre des jugements afin de garantir qu’ils sont fondés. Les questions suivantes reviennent donc souvent dans leur esprit : est-ce que ce que je pense et ce que j’ai toujours pensé sont encore vrais ? Y a-t-il une autre façon de voir les choses ? Ces interrogations leur permettent de valider leurs perceptions et de s’ajuster afin d’avoir une vision du monde précise et actualisée. La remise en question ne leur fait pas peur ! Au contraire, ils la voient comme un outil leur permettant de se mettre à jour et de continuer à apprendre au fil du temps.
Alors, est-ce que cette mise en contexte vous surprend ou est-ce que vous connaissiez déjà ces faits sur les leaders ? Que diriez-vous de répondre à un bref quiz afin de voir si vous savez repérer les mythes et les faits sur le leadership ?
Votre défi
Nous vous invitons à répondre par « vrai » ou « faux » aux énoncés suivants. Ces énoncés, qui ne vous laisseront pas indifférent, sont inspirés de Pamela McCauley Bush, chef de l’équipe de recherche sur les facteurs humains dans la gestion des catastrophes à la University of Central Florida. Par la suite, nous passerons en revue les réponses qu’elle propose afin de maximiser votre compréhension.
Écrivez vos réponses (vrai ou faux) avec la justification de votre choix dans votre journal d’apprentissage. Attention : pour maximiser votre apprentissage, ne consultez pas les réponses avant d’avoir terminé le quiz !
Vrai ou faux ?
- « Le leadership est une qualité que peu d’individus possèdent. »
- « Le leadership ne s’apprend pas : on naît avec ou sans le gène du leadership. »
- « Les leaders ont tous un charisme hors du commun. »
- « Le leadership, c’est uniquement pour les gestionnaires et les leaders d’entreprise. »
- « Contrôle, direction et manipulation sont les tâches préférées des leaders. »
- « La façon dont vous agissez dans votre vie personnelle n’a pas de lien avec votre capacité d’exercer le leadership. »
- « Les leaders connaissent tout, sur tout, tout le temps. »
- « Les leaders doivent être servis par leur équipe. »
Interprétation
1. « Le leadership est une qualité que peu d’individus possèdent. » Au risque d’en surprendre plus d’un, cette affirmation est fausse ! Chez chacun d’entre nous se cache, plus ou moins loin, un potentiel de leadership. Imaginez un iceberg : la pointe représente la manifestation visible du leadership au quotidien, tandis que le corps sous-marin symbolise le potentiel latent. Bien que la pointe soit la partie visible, la majeure partie de l’iceberg demeure cachée sous l’eau. De la même manière, beaucoup de personnes possèdent un potentiel de leadership qui n’est pas immédiatement apparent.
Ce potentiel de leadership ne demande qu’à être exploité, mais seule une partie des individus parvient à le convertir en compétences concrètes. Il est également important de noter que le leadership ne se manifeste pas de manière uniforme dans tous les contextes et domaines. Par exemple, une personne peut être un leader dans sa vie professionnelle mais pas dans ses loisirs, ou elle peut démontrer des compétences de leadership dans une entreprise déterminée mais pas dans une autre. Les leaders peuvent sembler être une minorité ou des exceptions, mais en réalité, des leaders potentiels existent partout !
2. « Le leadership ne s’apprend pas : on naît avec ou sans le gène du leadership. » Non. Là où il y a de la vie, il y a de l’espoir. Pour ceux et celles qui adhéraient à cette façon de penser pour justifier leur manque de leadership, vous n’avez plus d’excuses maintenant ! Les qualités et les traits associés aux leaders peuvent être développés, appris, pratiqués, assimilés et intégrés à notre façon d’être. Cependant, comme dans tout apprentissage, la condition préalable est d’avoir le désir et la volonté d’apprendre. Il ne faut pas craindre de changer certains comportements, d’essayer de nouvelles choses et de remettre en question nos anciens schèmes de pensée. En bref, quand on veut, on peut ! D’ailleurs, Melissa Horner conclut dans son vaste examen de la recherche sur le leadership que « les leaders sont créés, pas nés ».
3. « Les leaders ont tous un charisme hors du commun. » C’est faux ! Il est vrai que le charisme peut être utile pour un leader, mais il n’est en aucun cas un prérequis absolu. En réalité, les leaders qui en sont dépourvus peuvent très bien le développer et ajouter une corde à leur arc ! Des recherches sur le leadership, notamment celles de Jim Collins concernant le leadership de niveau 5, ont montré que les leaders calmes, humbles et solidaires sont souvent plus efficaces à long terme. Ainsi, le charisme n’est qu’un aspect parmi d’autres de la palette des compétences et des qualités qui peuvent faire d’un individu un leader efficace et respecté.
4. « Le leadership, c’est uniquement pour les gestionnaires et les leaders d’entreprise. » Non, tous les individus peuvent exercer du leadership, peu importe leur niveau hiérarchique ou leur autorité formelle. À l’inverse, il est tout à fait possible que des gestionnaires aient un faible capital de leadership. Ainsi, le leadership ne se limite pas à une fonction, mais dépend plutôt de la volonté d’agir. Les leaders se trouvent à tous les niveaux professionnels, dans tous types d’entreprises, et même en dehors du cadre professionnel. Le leadership peut être exercé par des bénévoles, des étudiants, et même des enfants. Chacun, en toutes circonstances, peut adopter des comportements de leadership.
5. « Contrôle, direction et manipulation sont les tâches préférées des leaders. » Non, contrôle, direction et manipulation sont les tâches préférées des tyrans qui ne sont pas des leaders authentiques. Ces derniers construisent des relations de qualité avec autrui et favorisent la coopération au sein de leur équipe. Ils ne sont pas redoutés comme les tyrans, mais admirés pour leur capacité à inspirer, soutenir, s’intéresser aux autres et se soucier de leur bien-être.
6. « La façon dont vous agissez dans votre vie personnelle n’a pas de lien avec votre capacité d’exercer le leadership. » Croire que nos comportements dans la vie personnelle n’affectent pas notre capacité à exercer le leadership est une erreur. Les comportements que nous adoptons dans notre vie personnelle ne sont pas totalement indépendants de ceux que nous choisissons dans notre vie professionnelle. Bien que nous jouions différents rôles selon les sphères d’activité, il existe une certaine cohérence. En fin de compte, nous sommes une seule et même personne, et il serait préoccupant de ne pas retrouver de similitudes et de parallèles entre les différents rôles que nous assumons. Ainsi, ceux qui ne sont pas alignés avec leurs valeurs et leur identité sont facilement remarqués par leur entourage. Souvent, un écart trop marqué entre le comportement personnel et professionnel est perçu comme un manque d’authenticité, ce qui peut entraîner une perte de confiance. Les leaders adaptent leur comportement aux circonstances tout en restant fidèles à eux-mêmes (valeurs, croyances, personnalité, etc.).
Si votre répertoire comportemental personnel inclut la tromperie, la malhonnêteté, l’immoralité, le manque d’intégrité et l’exploitation des autres, il est probable que ces traits se refléteront également dans votre vie professionnelle. En somme, nos comportements dans la vie personnelle sont intrinsèquement liés à ceux que nous adoptons au travail, car nous sommes une seule et même personne, et nos comportements tendent à se chevaucher.
7. « Les leaders connaissent tout, sur tout, tout le temps. » Non, contrairement à l’idée reçue, ils ne sont ni des devins ni des sages à consulter pour obtenir toutes les réponses. Ils sont conscients de leurs limites et cherchent à enrichir leur savoir et leurs compétences. Leur stratégie ? S’entourer de personnes expertes dans les domaines où ils manquent de connaissances. Combien de fois avons-nous entendu des entrepreneurs à succès attribuer leur réussite à leur capacité à bien s’entourer ? En reconnaissant leurs forces et leurs faiblesses, ces leaders ont su s’allier à d’autres dotés de compétences complémentaires. Ils reconnaissent leurs lacunes, admettent leurs erreurs et ne prétendent pas tout savoir. Cependant, plutôt que de rester immobiles, ils voient chaque question sans réponse comme une occasion de croissance. Ainsi, il est fréquent de les entendre dire qu’ils ne possèdent pas encore la réponse, mais qu’ils la trouveront bientôt.
8. « Les leaders doivent être servis par leur équipe. » Non, au contraire, ils établissent avec leurs membres une relation de coopération mutuelle, loin du pouvoir et de la domination. En soutenant leur équipe, ils reçoivent également leur soutien en retour. Cette dynamique d’échange favorise une vision commune où chacun se sent responsable. Cette cohésion renforce l’équipe, permettant à tous ses membres de se soutenir mutuellement et de gagner ensemble.
Réflexion
Répondez aux questions suivantes dans votre journal d’apprentissage.
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Quels mythes vous ont le plus surpris ? Pourquoi ?
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Quelles idées avez-vous sur le leadership et lesquelles aimeriez-vous réfuter ? Transformez trois mythes de votre choix en « vérités » sur le leadership.
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Pourquoi est-il important que les leaders confrontent leurs idées préconçues ?
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Comment les leaders peuvent-ils identifier et remettre en question les mythes des membres de leur équipe concernant le leadership ?
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Quels sont les défis auxquels vous pourriez devoir faire face en essayant de déconstruire des mythes sur le leadership au sein de votre équipe ?
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Comment pouvez-vous utiliser les nouvelles perspectives sur le leadership pour renforcer la cohésion et l’efficacité de votre équipe ?
Faites part de vos réflexions à votre équipe de rétroaction et notez leurs réactions dans votre journal d’apprentissage.
Plan d’action
Dans votre journal d’apprentissage, notez ce que vous comptez faire dorénavant pour remettre en question les idées préconçues, les stéréotypes et les préjugés dans votre vie quotidienne. Identifiez trois actions concrètes pour y parvenir ainsi que trois actions pour sensibiliser les autres à ces mythes.
Roxanne : Ah, le leadership, influencer les autres pour atteindre un but… Les gens ont beaucoup d’opinions sur ce qu’il faut pour devenir un bon leader.
Roger : Bien sûr. Cet exercice m’a rappelé que je pensais qu’il fallait être charismatique, charmant et motivant pour être un bon leader. Mais ce n’est pas vrai du tout. En fait, des chercheurs comme Jim Collins ont constaté que les meilleurs leaders sont des personnes humbles qui recrutent des individus très compétents et autonomes. Ces leaders n’ont pas besoin de charisme ou de charme pour motiver les gens à accomplir de grandes choses.
Roxanne : Je suis d’accord. En réalité, j’ai du mal à faire confiance aux leaders « vedettes ». Ils semblent se concentrer sur eux-mêmes et leur image. En même temps, je n’aime pas les leaders paternalistes (ou maternalistes), tu sais, ceux qui veulent prendre en charge leurs collaborateurs sous prétexte qu’ils ne peuvent pas se débrouiller seuls. Les personnes compétentes et autonomes n’ont pas besoin d’être surprotégées par leurs leaders. J’admirais ces leaders auparavant, mais j’ai réalisé qu’ils limitaient la croissance de leurs collaborateurs.
Roger : C’est vrai. As-tu d’autres idées préconçues sur le leadership que tu aimerais discuter ?
Roxanne : Eh bien, je n’aime pas les stéréotypes ; par exemple, l’idée selon laquelle les femmes sont toujours des leaders qui soutiennent les membres de leur équipe, ou que les hommes sont naturellement plus décidés. Ces généralisations ne sont pas toujours vraies et sont peu utiles. Elles classent les gens dans des catégories, mais j’ai vu trop d’exceptions pour que ça soit valable !
Roger : Utiliser des stéréotypes et discriminer pour juger le leadership de quelqu’un sont tellement réducteurs. Comme le disait Carl Jung : « Il est assez stérile d’étiqueter les gens et de les presser dans des catégories. » Dans mon ancienne entreprise, certains collègues avaient des réticences à travailler pour un gestionnaire qui avait immigré dans notre pays il y a quelques années. Ils disaient ne pas comprendre son accent et pensaient qu’il n’avait rien à leur apprendre. Quand j’ai pris le temps de lui demander de répéter ce que je ne comprenais pas et que j’ai fait l’effort de le connaître, j’ai réalisé qu’il y avait beaucoup de choses que je pouvais apprendre de lui.
Roxanne : Maintenir ces idées préconçues a vraiment limité tes collègues. Je suis contente que tu aies pu sortir de cette mentalité ! Bravo, Roger !
Roger : Merci. Je fais particulièrement attention à ne pas enfermer les autres dans des boîtes.
Roxanne : Oh, qu’entends-tu par ça ?
Roger : Eh bien, j’essaie de ne pas les étiqueter ni de les juger trop vite. Je m’efforce de rester ouvert à leur égard, ce qui facilite vraiment la compréhension mutuelle.