Le deuxième fondement
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Que détestez-vous et qu’appréciez-vous?
«NelsonMandela dit que les hommes ont souvent plus peur de leur côté lumière que de leur côté ombre. La réussite est difficile à porter. Une fois accomplie, il est essentiel de rester humble : évitez de dire : « Je l’ai fait. J’ai réussi. Je suis bon.« Pour éviter de paraître vantard, j’ajoute parfois avec humour : « Je me prends vraiment pour 10!« Cette expression me permet de me déculpabiliser.» – RémiTremblay
«Vous devenez ce à quoi vous donnez votre attention.» – Épictète
Nous vous proposons de faire les choses différemment pour cet exercice. Laissez-vous porter et attendez avant de lire l’interprétation.
Votre défi
Nous vous invitons à inscrire les réflexions suivantes dans votre journal d’apprentissage. Écrivez plusieurs paragraphes par réflexion; plus c’est détaillé, mieux c’est!
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Décrivez au moins trois choses que vous détestez le plus chez une autre personne.
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Décrivez au moins trois qualités que vous appréciez le plus chez une autre personne.
Réalisez ces deux réflexions avant de lire plus loin.
Votre ombre est à l’œuvre!
Ce que vous détestez le plus chez autrui, c’est l’ombre de vous-même! Comme le mentionne KellenVon Houser, une conseillère professionnelle, dans son article « What you hate most in others, is the shadow within yourself », notre ombre est ce que nous refusons de reconnaître à propos de nous-mêmes. Mais comment trouver cette ombre? Selon ses propos, il est possible d’y parvenir de deux façons différentes :
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Il est possible de découvrir notre ombre d’une manière plutôt positive. Il suffit de nous questionner sur ce qui nous fait particulièrement rire, sur ce qui déclenche en nous un rire sincère. Quand est-ce que vous éclatez de rire? Rire à une plaisanterie, c’est saisir ce dont il est question et y trouver une part de vérité personnelle.
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Il est possible d’identifier précisément les personnes que nous apprécions moins, voire que nous n’apprécions pas du tout. Ensuite, il est essentiel de préciser ce qui nous déplaît chez elles : leur manière de s’exprimer, leurs défauts, leur personnalité, par exemple. Une fois ces traits identifiés, essayez de voir s’ils se retrouvent également en vous. Nos propres défauts nous échappent souvent. Cependant, lorsque nous reconnaissons ces mêmes défauts chez autrui, ils prennent soudainement une dimension exacerbée. C’est ainsi que nous pouvons développer un fort ressentiment envers ces traits chez les autres. Comme le souligne AnaïsNin : «Nous ne voyons pas les choses telles qu’elles sont, nous les voyons telles que nous sommes.»
Vous pouvez également détester ce que vous aimeriez posséder. Par exemple, si vous n’êtes pas du genre à saisir les occasions par peur de l’échec, vous pourriez ressentir une certaine irritation envers les personnes confiantes, volontaires et audacieuses. En réalité, en détestant ces caractéristiques chez autrui, vous reconnaissez que vous ne les avez pas vous-même. Ce que vous détestez vraiment, ce sont vos propres lacunes.
Nous éprouvons du ressentiment envers nos défauts lorsque nous les remarquons chez autrui! Observer les autres, c’est comme se regarder dans un miroir… Est-ce que cela vous évoque quelque chose? Prenons un exemple. Imaginez que vous possédez une vidéo de vous-même en vedette. Seriez-vous à l’aise de la regarder? Peut-être, peut-être pas… En fait, dès que vous visionnez cette vidéo, vous faites face à vous-même… et à vos défauts! Ils vous sautent aux yeux : vos expressions, vos tics, vos réactions, tout! Ainsi, lorsque vous vous examinez, vous voyez ce qui vous trouble et ce qui vous déplaît, car vous connaissez vos imperfections mieux que quiconque. C’est exactement la même chose lorsque vous observez autrui : vous remarquez immédiatement ce qui vous dérange chez vous.
Le psychiatre DrCarlJung aborde également le concept de l’ombre. Selon lui, tout ce que nous ne pouvons pas accepter, assumer ou reconnaître dans notre personnalité constitue notre ombre. Ce sont des aspects de nous-mêmes qui résident profondément en nous, mais qui restent inexprimés, comme des bourgeons qui attendent de fleurir. Lorsque nous identifions ces traits chez les autres, cela résonne en nous d’une manière particulière. Certaines personnes sont conscientes de leur ombre, tandis que d’autres préfèrent l’ignorer par peur ou inconfort. Comme le souligne KellenVon Houser, «nous devons regarder dans l’obscurité pour trouver la lumière». En nous familiarisant avec notre ombre, nous nous ouvrons davantage à l’acceptation de soi et à la tolérance envers les autres.
Vous l’aurez compris, nous reconnaissons ce que nous connaissons. Avez-vous déjà remarqué ce que vous voyez lorsque vous observez le monde? Nous avons tendance à percevoir ce que nous ressentons et ce que nous sommes. Ainsi, si vous rencontrez des personnes joyeuses partout où vous allez, cela peut refléter votre propre état d’esprit positif. De même, si la présence de personnes heureuses vous agace, cela pourrait indiquer que vous ne vous sentez pas pleinement épanoui à ce moment-là. KellenVon Houser souligne également que si vous êtes constamment aux prises avec des menteurs ou des tricheurs, cela pourrait être le reflet de votre propre ombre projetée sur autrui. Espérons que ce ne soit pas votre cas.
Vos interprétations découlent de votre perception personnelle.
Comme l’exprimait Jean Lorrain, professeur retraité en administration à l’UQTR, chaque individu a une perception unique en raison de ses différences individuelles. Chacun possède un cadre de référence distinct et accorde de l’importance à des aspects variés. Pour les leaders, comprendre la subjectivité de la perception est essentiel. Ils doivent reconnaître que les membres de leur équipe pensent et comprennent les choses différemment, nécessitant ainsi une adaptation. En effet, les leaders doivent ajuster leur propre perspective, sachant que leurs collaborateurs peuvent avoir des perceptions divergentes. Pour améliorer cette compréhension du processus perceptuel, plusieurs conseils s’offrent à vous :
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Le monde tel que nous le percevons diffère de celui perçu par les autres et de la réalité objective. Il s’agit d’une interprétation subjective plutôt que d’une vérité absolue. Dans ce contexte, les leaders doivent exercer un jugement nuancé. Ils doivent reconnaître que leur perception d’une situation est personnelle et peut différer de celle des autres. Chaque individu voit les choses à sa manière, et il est essentiel de respecter cette diversité. Comme le soulignait Lorrain, les expériences passées influencent profondément notre manière de percevoir et de comprendre le monde. Pour mieux comprendre les perspectives des autres, il est crucial de partager, de communiquer et de manifester un véritable intérêt pour leur point de vue.
- Commencer par se connaître soi-même de manière authentique est essentiel pour percevoir le monde de façon plus juste. En ayant une vision réaliste de vos forces et de vos faiblesses, vous serez mieux équipé pour avoir des perceptions plus précises de la réalité. Une bonne connaissance de soi-même vous permet également de reconnaître que chaque personne possède ses propres forces et faiblesses. Cela favorise une perspective plus nuancée et une tolérance accrue envers soi-même et envers les autres. De plus, lorsque vous avez une image de vous-même bien définie, incluant aussi bien vos aspects positifs que négatifs, vous êtes plus enclin à accepter les autres tels qu’ils sont. Une personne qui se perçoit comme parfaite aura du mal à accepter les imperfections des autres. En revanche, une personne consciente de ses propres imperfections sera naturellement plus tolérante envers celles des autres.
- Évitez de tomber dans le piège de la projection, qui consiste à attribuer à autrui vos propres caractéristiques. Par exemple, si Roger se retrouve souvent entouré de personnes en colère et que ses relations interpersonnelles sont tendues, il pourrait se demander si son propre état émotionnel y contribue. Plutôt que de blâmer les autres, Roger devrait réfléchir à ses propres sentiments et se demander s’il a pu influencer certaines situations conflictuelles. En se connectant à ses émotions internes, il peut éviter de projeter ses propres sentiments sur les autres. Reconnaître nos propres défauts facilite également l’acceptation des défauts chez autrui, car la projection explique pourquoi nous sommes souvent plus conscients des défauts des autres que des nôtres.
- Faites preuve d’empathie. Si vous souhaitez comprendre les sentiments et les perceptions des autres, essayez de vous mettre à leur place. Voyez le monde à travers leurs yeux et ressentez ce qu’ils ressentent. Ce simple exercice peut vous offrir une perspective entièrement nouvelle sur les autres.
- Soyez conscient de l’image que vous projetez. Les premières impressions comptent, car les gens se basent souvent sur ce qu’ils voient immédiatement. Mettez donc en avant vos qualités et assurez-vous que votre image reflète fidèlement qui vous êtes. Il ne s’agit pas de présenter une façade complètement différente, mais de présenter une version authentique et positive de vous-même dès le premier regard. En somme, projetez toujours votre véritable personnalité.
- Gardez en mémoire que votre passé influence vos perceptions présentes. Ce que vous avez vécu et perçu par le passé introduit un biais dans votre façon actuelle de voir les choses. Ainsi, comprenez que vos perceptions ne sont pas neutres et sont plus personnelles que vous ne le pensez. Par exemple, si vous avez eu des expériences désagréables en travail d’équipe par le passé, il est probable que vos expériences actuelles en équipe vous semblent plus difficiles qu’elles ne le sont en réalité. En prenant conscience de cela, vous pouvez développer une perception plus précise de votre réalité.
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Transformez la perception en une alliée. Connaissez-vous le concept des prophéties autoréalisatrices? C’est une manière indirecte et positive d’influencer les gens qui vous entourent. En communiquant vos attentes et vos perceptions à une personne, vous pouvez l’aider à devenir ce que vous souhaitez qu’elle soit. Un processus en trois étapes, identifié par RichardField et DavidVanSeters, peut vous aider à réaliser une telle prophétie avec vos collaborateurs ou votre entourage. Tout commence par le leader ayant une attente positive envers un membre de son équipe, qu’il communique ensuite à cette personne, qui l’accepte. Cela stimule la motivation du membre, qui commence à adopter des comportements alignés avec cette attente positive. Par exemple, le supérieur de Roger croit en ses capacités et lui en fait part avec reconnaissance pour son travail quotidien. Roger se sent ainsi valorisé et intègre cette attente positive. En réponse, il se motive à améliorer ses performances. À la fin de l’année, Roger se retrouve effectivement au sommet de son équipe. Voilà comment des croyances positives peuvent mener au succès, comme le suggèrent RichardField et DavidVanSeters! En cultivant une image positive de vous-même, vous pouvez progressivement vous y conformer, comme le dit l’adage en anglais: «Fake it until you make it!»
En résumé, retenez que la perception est intrinsèquement liée à chaque individu. Chacun reçoit des informations perceptuelles différentes, les interprète selon ses propres critères et leur accorde une importance variable. Mais comment peut-on alors savoir ce que les autres perçoivent? C’est par l’échange, la communication et un intérêt sincère pour ce que les autres voient, ressentent et comprennent.
Après que vous avez relevé ce défi, il est normal que vos sens soient particulièrement aiguisés et que vous interprétiez intensément ce que vous observez chez les autres. C’est un effet secondaire naturel de la prise de conscience de votre propre «ombre», mais avec le temps, ces effets s’atténueront. Cependant, rappelez-vous que découvrir votre «soi caché» est un processus sain qui vous permet de mieux comprendre toute votre personnalité et peut même vous inspirer à ajuster certains de vos comportements. Selon KellenVon Houser, il est plus bénéfique de se connaître profondément que de se contenter de l’image idéalisée que nous présentons aux autres comme étant la vérité. Êtes-vous d’accord avec cette idée?
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Autoévaluation rapideSur une échelle de 1 à 10, à quelle fréquence projetez-vous vos propres caractéristiques sur autrui? Veuillez expliquer votre réponse dans votre journal d’apprentissage.
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Réflexion
Répondez aux questions suivantes dans votre journal d’apprentissage.
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Quelles ont été vos réactions après avoir lu les interprétations de cet exercice? Avez-vous rencontré des difficultés à accepter ces interprétations?
- Avez-vous réfléchi à des façons d’exploiter cet exercice pour en tirer des bénéfices personnels?
- Quels parallèles pouvez-vous faire entre ce que vous appréciez et ce que vous n’aimez pas chez les autres?
- À la lumière de cet exercice, quelles conclusions tirez-vous sur vous-même?
- Pourquoi est-il crucial pour les leaders de reconnaître que leurs perceptions sont subjectives?
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Comment les leaders peuvent-ils aider les membres de leur équipe à prendre conscience de leurs propres perceptions?
Faites part de vos réflexions à votre équipe pour enrichir le dialogue et les apprentissages mutuels.
Plan d’action
Décrivez dans votre journal d’apprentissage trois actions concrètes que vous prévoyez d’entreprendre différemment à la lumière des enseignements tirés de l’exercice. Ces actions pourraient inclure des ajustements, des corrections ou des initiatives nouvelles basés sur vos apprentissages.
Roxanne : Il est souvent facile de projeter sans s’en rendre compte! J’ai pris conscience que les autres nous influencent à la fois positivement et négativement, à travers leurs actions, leur comportement et leurs attitudes.
Roger : Au début, j’ai eu du mal à accepter les révélations de l’exercice, mais j’ai trouvé une façon personnelle de les interpréter qui m’était utile. Par exemple, j’ai exprimé mon mépris pour les personnes qui arrivent en retard, trouvant cela très irrespectueux. Cependant, j’ai réalisé que ce n’était pas une de mes propres faiblesses. En fait, je suis souvent trop en avance pour les réunions. En y réfléchissant, j’ai compris que cette sensibilité excessive à la ponctualité vient de mon éducation : être à l’heure était une règle stricte dans ma jeunesse. Ça m’a appris que faire attendre les autres est impoli et que l’embarras d’arriver en retard peut être difficile à gérer. Maintenant, je vois que j’ai besoin de trouver un équilibre et de me détendre à ce sujet.
Roxanne : Fascinant! Il aurait été facile de me mettre sur la défensive et de rejeter immédiatement l’idée que ce que je méprise chez les autres puisse être un reflet de moi-même. C’était ma première réaction. J’ai écrit à propos d’une personne toujours négative, critique et méfiante, qui voit toujours le côté sombre des choses et évite les nouvelles situations ou approches. En revanche, dans la seconde partie, j’ai décrit une amie très amicale, gentille, ouverte aux autres et à leurs idées, prête à essayer de nouvelles choses. En analysant ces récits, j’ai d’abord eu du mal à voir comment ils pourraient refléter mes propres traits. Comment puis-je être à la fois critique et ouverte? En prenant du recul, j’ai réalisé que ces récits illustrent ce que j’appelle des attitudes d’évitement et d’approche. Le premier décrit une tendance à éviter la vie, à avoir peur et à hésiter, tandis que le second reflète une attitude d’ouverture, d’engagement et de réceptivité. Je comprends maintenant qu’ils représentent deux extrémités d’un même continuum. Lorsque tout va bien, j’adopte souvent une attitude d’approche, mais lorsque je suis stressée, fatiguée ou de mauvaise humeur, je tends vers l’évitement. En somme, ces deux récits (le négatif et le positif) sont des aspects de ma personnalité en fonction des circonstances.
Roger : C’est une perspective intéressante sur la manière dont notre ombre se manifeste dans notre vie. Je n’y avais jamais vraiment réfléchi auparavant, mais je crois que CarlJung mentionne que nous avons tendance à laisser émerger notre ombre lorsque nous sommes en situation de stress. Il est probable que mon côté obscur se manifeste selon mon état émotionnel du moment. Je vais réexaminer ce que j’ai écrit!